Retour sur le fameux « reset »

Suite à la fâcheuse et très gênante débandade de la saison dernière, les fans montréalais réclamaient à grands cris une reconstruction en règle. L’exemple des Maple Leafs était souvent cité pour démontrer les bienfaits d’une telle manœuvre. Enfin, nous étions prêts à accepter de perdre pour mieux gagner. Certains partisans allaient même jusqu’à réclamer qu’on transige Shea Weber et Carey Price en retour de bons espoirs et d’une montagne de choix.

Qu’à cela ne tienne, Marc Bergevin avait d’autres plans en tête. Pris à partie lorsqu’il a osé échanger le talentueux Alex Galchenyuk pour un marqueur de 9 buts (8, selon Luc Lavoie), le DG du Tricolore a passé l’été à marteler que son équipe n’était pas en reconstruction.



Même chose lorsqu’il a envoyé son meilleur marqueur, Max Pacioretty, à Vegas en retour de Nick Suzuki et Tomas Tatar (plus un choix de 2e ronde). Considéré comme un simple throw-in, Tatar rend actuellement de précieux services à sa nouvelle équipe. Son style de jeu et son implication en générale cadrent bien mieux avec la ligne directrice qu’on tente d’instaurer à Montréal. Certes, Tatar impressionne mais sa production actuelle n’est pas vraiment surprenante. Ses 16 buts et 39 points représentent une moyenne de 25 buts et 60 points sur un calendrier de 82 matchs. Des marques qu’il a déjà prouvé pouvoir atteindre en 2014-15 (29 buts, 56 points). Mais bon, il faut reconnaître qu’il n’avait jamais plus flirté avec de telles campagnes depuis (sauf une récolte de 25 buts en 2016-17). Avec du recul, je crois quand même qu’il est temps de reconnaître que la Direction savait ce qu’elle faisait lorsqu’elle s’est arrangée pour que l’ailier Slovaque soit inclus dans le deal.

Car c’est une autre chose que le Directeur Général a souvent répété : son équipe était bien meilleure que ce que sa fiche indiquait et il y avait d’abord et avant tout un gros problème d’attitude. Encore une fois victime de moqueries, Bergevin a tenu son bout et refusé de parler de reconstruction.

«Je ne suis pas prêt à dire qu’on fait une reconstruction, on amène des joueurs de calibre LNH sans donner nos jeunes» – Marc Bergevin, TVA Sports

En effet, l’architecte a ajouté des pièces importantes à son groupe d’attaquants, en mettant coup sur coup la main sur Domi, Tatar et… Joel Armia. Dans la foulée, Bergevin avait d’ailleurs reconnu qu’il avait tenté de convaincre Paul Stastny de venir à Montréal. Pas exactement le genre de décision qu’on prend lorsqu’on dirige une équipe qui est en reconstruction.



Pourtant, on l’accusait de se mettre la tête dans le sable. Il refusait d’admettre l’évidence, disait-on. Aujourd’hui, avec une fiche de 29-18-6  – dont un excellent 7-2-1 au cours de la dernière tranche de 10 matchs -, force est d’admettre que l’équipe surprend. Si les plus optimistes d’entre nous espéraient voir l’équipe lutter pour une place en séries, il était assez difficile d’avancer que ces derniers pourraient en vérité être en train de lutter avec les puissants Maple Leafs pour la 2e place de la Division Atlantique après plus de 50 matchs.

Quand le Tricolore a commencé à éprouver des ennuis, tout juste avant le retour de Shea Weber, les détracteurs n’ont pas manqué l’occasion de cogner un peu plus sur Bergevin. Ceux-ci clamaient alors que l’équipe était bel et bien en reconstruction. Puis, le Man Mountain est venu tout gâcher. Son retour n’a pas seulement contribué à replacer tous les défenseurs dans la bonne chaise, permettant du même coup à l’équipe de se passer de Schlemko et Alzner, mais également directement eu un impact sur les performances de Carey Price.

Après tout, dans les succès de son équipe, le DG misait beaucoup sur un retour au sommet de son gardien étoile, après une saison à oublier. Depuis le retour de son capitaine, le cerbère s’est hissé parmi les meilleurs gardiens de la ligue, et ce, à tous les niveaux. Ce seul facteur est venu complètement changer le visage de l’équipe. Non seulement l’attaque de celle-ci continue de fournir près de 3 buts par match (2.74), mais le gardien arrête les pucks.

Bref, plus les favoris de la foule cumule les succès, plus l’enthousiasme grimpe. Cela dit, certaines personnes affirment qu’il ne faut pas bouger à la prochaine date limite, arguant qu’il faut rester fidèle au plan. Mais quel plan ? Il faut poursuivre le reset, affirme-t-on. Dès le début, j’ai visiblement interprété le terme différemment de plusieurs autres :

Reset

Là où certains semblaient voir une malversation visant à camoufler une reconstruction secrète, j’ai vu l’exercice comme étant une restructuration. Quelque chose de plus semblable à ce que les Blues ont tenté que ce que les bonne vieilles reconstructions en règles. Pour ma part, Marc Bergevin a appuyé sur le bouton « reset » cet été, en effectuant les mouvements mentionnés plus haut. Pour vulgariser, je dirais qu’au lieu de changer le jeu, il l’a redémarré en choisissant des nouveaux personnages. En ce qui me concerne, son reset est fait. Il continuera bien entendu de travailler pour améliorer son équipe – c’est-à-dire, faire son travail -, mais il ne faudrait pas oublier qu’il a répété plusieurs fois qu’il croyait aux séries. Encore une fois, il ne s’agit pas d’un discours typique d’un DG qui prévoit liquider ses meilleurs joueurs pour obtenir du futur… En ce sens, à l’approche de la date limite, je m’attends à le voir faire la même chose que toutes les autres années, à l’exception des saisons 2015-16 et 2017-18 alors que le Canadien était exclu des séries, bien sûr. C’est-à-dire que je m’attends à le voir bouger pour améliorer son équipe. Ceci, sans sacrifier son avenir. Après tout, il n’a jamais caché son aversion pour la chose. J’ajouterais également la saison 2016-17 au lot… Please, no more Dwight King ! À mon avis, si Bergevin peut mettre la main sur Jeff Petry, il n’hésitera pas un seul instant. Parce que son club n’est pas en reconstruction.



Certes, il y a quand même un peu de « chance/surprise » derrière tout ça. Par exemple, on ne pouvait vraisemblablement pas savoir que le jeune Jesperi Kotkaniemi s’adapterait aussi bien, aussi tôt, au calibre de jeu (et à la patinoire) de la LNH. Le simple fait qu’il soit déjà NHL ready a permis à l’équipe de se départir des services de Tomas Plekanec. La charge de jeu que prend la jeune recrue réduit également la tâche de Domi et Danault sur la ligne de centre. En clair, cette position névralgique est de facto devenue bien meilleure par la simple présence de Kotkaniemi. Mais bon, le hockey est aussi un jeu de surprises. Sinon, les Capitals, avec à peu près le même alignement, champions de la dernière saison, ne seraient pas en train de jouer avec le feu. Avec seulement 2 victoires au cours de leurs 10 derniers matchs, les champions en titre devront rapidement retrouver leurs repères pour espérer avoir des chances de répéter leur exploit… Bring Back Barry Trotz ! 

Parlant des entraîneurs, je suis assez surpris de voir Claude Julien être aussi souvent ciblé par les critiques. Le gars a pris une formation qu’à peu près tout le monde classait comme potentielle pire équipe de la ligue et il en a fait le 4e meilleur club de l’Est et le 8e meilleur du Circuit Bettman, mais il serait un entraîneur franchement mauvais ? Si ni Julien, ni Bergevin ne sont derrière les succès de l’équipe, d’où viennent-ils ? De la simple chance ? J’en doute.

Bien sûr, les choses peuvent changer rapidement au hockey #Capitals #Islanders #Sabres #Flyers… etc, etc. En conséquence, il est tout à fait possible que le Canadien s’écroule durant les prochaines semaines. Après tout, personne n’est à l’abris des blessures et/ou d’une baisse de régime. Surtout que le Canadien fera face à un défi de taille, cette semaine, tandis qu’il se mesurera aux puissants Jets… le tout, en devant possiblement se passer des services de Paul Byron. Hudon et Peca devraient donc bénéficier d’un nouveau sursis.

On verra bien !

Pour l’heure, je désirais tout simplement utiliser cette tribune pour expliquer pour quoi, pour moi, le Canadien n’est pas une équipe en reconstruction. Cela dit, je ne suis pas particulièrement contre l’idée. Je me suis d’ailleurs déjà prononcé en faveur d’un tel scénario, utilisant justement Winnipeg en guise d’exemple. En 2018-19, alors que la masse des partisans réclamaient elle-même une reconstruction en règle, je ne crois pas que les dirigeants se seraient gênés d’utiliser le terme par simple « peur ». Je crois tout simplement que Bergevin – qui a fait et continuera de faire des erreurs – savait ce qu’il faisait, et surtout, savait que son équipe avait un meilleur potentiel que ce qu’elle nous avait démontré.


En Prolongation
En l’espace d’un an, la plupart de ces joueurs sont passés de réguliers à spares. Ces signes, je le crois, de la profondeur qu’on est parvenu à greffer au groupe.

Cela dit, si l’attaque peut se permettre de se passer d’un ou deux joueurs réguliers, il faut se croiser les doigts pour que la ligne bleue soit épargnée. À l’heure actuelle, une blessure à Weber ou Petry pourrait mettre l’équipe dans l’eau chaude. En ce sens, je pense évidemment que Marc Bergevin est activement à la recherche de renfort… mais pas à n’importe quel prix.

Je termine cet article avec ce beau but, inscrit par Brett Stapley, le choix de 7e ronde du Canadien au dernier repêchage :

En 23 matchs avec l’Université de Denver, l’attaquant qui aura 20 ans le 23 février prochain a déjà récolté 17 points. Il est encore très tôt, mais disons que cette cuvée pourrait s’avérer devenir un point tournant dans les succès futurs du grand club. À suivre… 


Crédit image entête, André Pichette/La Presse


Tom L.D. MacAingeal
 

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