Tootoo, le train s’en vient!

Je me revois très clairement: on est en 2002, pendant les vacances de Noël. Je suis alors un adolescent qui croit tout connaître du hockey. Il est vrai que j’ai vu beaucoup de « soirées du hockey » et que je suis dur à battre à « Wayne Gretzky 3D Hockey », mais il me restait bien des croûtes à manger…

Des croûtes de pizza, est-ce que ça fait?

Toujours est-il que, comme chaque année, je m’installe devant le Championnat mondial junior de Hockey, quand, tout à coup, j’entends un nom à la sonorité discordante, par rapport au patronyme du reste des joueurs de l’alignement.

Tootoo.

Ce joueur s’appelait Jordin Tootoo.

Peut-être que son nom de famille a attiré mon attention, mais son intensité, son caractère et sa fougue ont fait le reste du travail.

Même si, du haut de son mètre et trois quarts, il n’avait pas la charpente, pour se tenir au-dessus de la mêlée, il ne s’en laissait nullement imposer. J’adorais son style de jeu, son chien et son mordant.

Toujours est-il que je fus immédiatement charmé, mais, principalement parce qu’il évoluera majoritairement, dans l’ouest, je le perdis de vue, à quelques nouvelles près.

Visiblement, même à Nashville, il n’avait rien perdu de son intensité, qu’importe s’il a arboré, ou non, le curieux maillot jaune Dijon…

En grattant encore plus, j’ai appris que Jordin Tootoo a marqué l’histoire en devenant le premier Inuk à évoluer, dans la Ligue nationale de hockey.

Personnellement, en tant que diabétique, depuis toujours, je sais combien il est important de pouvoir s’identifier à quelqu’un « qui a réussi »

… Je sais: le concept est fort subjectif…

Pour ce qui est d’un joueur de hockey diabétique, le premier dont j’ai eu connaissance est Cory Conacher, qui a certes brûlé la Ligue américaine de hockey, mais le tout s’est échelonné, sur moins de cinq ans.

Avec un peu de recherche récente, j’ai appris que le légendaire Bobby Clarke, qui totalise 1210 points, en 1144 matchs, souffrait aussi de diabète, mais, à l’époque où j’avais encore le droit de rêver à la LNH, les recherches n’étaient pas aussi simples qu’aujourd’hui…

Maintenant, avec Kaapo Kakko et Max Domi qui semblent maîtriser leur santé autant qu’Alain Choquette maîtrise l’illusion, ce n’est même plus une question, de savoir si un enfant diabétique peut rêver à évoluer, dans les plus grandes ligues, mais, à l’époque… Ce n’était pas aussi limpide…

Disons que, pour paraphraser: la fenêtre, vers le futur, était bien embuée… Ou mon gars avait allègrement passé ses doigts, dedans. C’est selon.

À mon humble avis, la situation n’était pas si différente, pour les jeunes inuits du Nunavut, jusqu’au début des années 2000.

Qui leur avait prouvé que c’était possible?

En fait, le premier joueur inuit à jouer professionnellement fut Terence Tootoo, le grand frère de Jordin, ce dernier, l’aîné, joua en effet avec l’Express de Roanoke, dans la East Coast Hockey League. Roanoke est une ville de l’État de la Virginie, aux États-Unis.


Toutefois, à l’image du titre intrigant des romans de Danielle Cuivre, le personnage inventé par l’humoriste François Morency, ce n’est qu’une infime partie de l’histoire des frères Tootoo, les pionniers du hockey, chez les Innus.

En effet, à l’été 2002, alors que la carrière de Jordin prenait son envol, son frère s’enlève la vie, dans de nébuleuses circonstances.

Lors de cet été charnière, les deux frères s’entraînaient, à Brandon, en Ontario. C’est à la suite d’une soirée bien arrosée que le frère aîné prit le volant.

Ce qui devait arriver arriva, Terence Tootoo fut intercepté, par une voiture-patrouille de police puis il fut emmené au poste de police du comté. À cet endroit, les membres des forces de l’Ordre tentent en vain de joindre la famille qui gardait les frères en pension.

C’est alors que, contrairement à la politique ordinairement suivie, les policiers laissèrent Terence où il était domicilié, sans qu’aucun adulte sobre ne le prenne en charge.

Plusieurs soulevèrent l’hypothèse que les agents eussent agi de la sorte, parce que les frères Tootoo étaient très populaires, dans cette ville, et que les policiers ne voulaient pas attirer l’attention, ou parce que Jordin Tootoo vivait une idylle avec la fille du Shériff…

Mais vous savez comment on appelle des accusations sans preuve?

Des cancans.

Les Roy, qui auraient dû se voir confier le jeune homme tourmenté, enclenchent une bataille judiciaire, mais celle-ci se réglera à l’amiable.

C’est lorsqu’il se retrouva seul, dans sa résidence de pension, que le jeune homme intoxiqué saisit le fusil de chasse appartenant aux propriétaires des lieux, puis s’enlève la vie, dans les eaux de cinq heures du matin, le 28 août 2002, dans le boisé, derrière la résidence.

Le jeune homme sans vie ne laissa qu’un court mot adressé à son petit frère, mais il laissa surtout une tonne de questions qui ne trouveront jamais de réponses, la principale étant… Pourquoi?

Une quantité effarante de joueurs et même d’entraîneurs et de gestionnaires sont aux prises avec des problèmes de santé mentale…

Et le nombre de cas qui ont été dévoilés n’est qu’une infime partie de ceux qui souffrent en silence.

Vite comme ça, je peux citer: Theoren Fleury, Bobby Ryan… Humm, Gritty?

Il a l’air louche, lui…

Bref.

Une goutte d’eau, dans l’océan.

Dans les faits, au Québec, comme dans le reste du Canada, environ une personne sur cinq: souffre, a souffert ou souffrira de problèmes de santé mentale, au cours de sa vie.

Partons du fait qu’il y a 22 joueurs par équipe, et que la ligue compte 31 équipes, pour un total de 682 joueurs, de façon approximative, au coeur de la Ligue nationale de hockey.

Ensuite, divisons ce nombre par cinq, soit le ratio canadien de personnes touchées par un problème de santé mentale.

136,4… Bon, disons 136.

Évidemment, ce sont des approximations, mais je ne vois pas pourquoi les athlètes seraient immunisés, face à de tels soucis de santé, surtout quand on pense à la pression écrasante que ceux-ci endurent, jour après jour, année après année.

Non, pour la plupart, ils n’ont aucun mal à boucler les fins de mois, mais rappelons-nous qu’ils se tiennent tous sur un siège éjectable au levier extrêmement fragile.

Le 28 janvier, partout au Canada, ce sera la journée « Bell cause pour la cause ». Au cours de cette journée, pour: chaque message texte, chaque appel applicable, chaque tweet, chaque vidéo tiktok utilisant le mot-clic #bellcause, chaque partage de leur vidéo, chaque utilisation de leur cadre Facebook ou chaque utilisation de leur filtre snapchat, Bell versera cinq cents, à des initiatives canadiennes en santé mentale.

Je joins donc ma voix à celle de la méga compagnie des communications, pour vous exhorter, de grâce, à donner, pour la santé mentale.

En plus, vous donnez, et ça ne vous coûte rien.

Si vous vous sentez détachés, face à cette cause, je peux vous garantir que bien peu de gens savaient que j’étais aux prises avec des troubles de santé mentale, ou, comme je les appelle, « les bibittes, dans ma tête », même quand j’étais au plus bas, donc ça pourrait forcément être quelqu’un qui vous est très cher.

Dans le doute, rappelez-vous de Jordin Tootoo qui ne s’est jamais douté que son frère, son propre frère et meilleur ami, commettrait l’irréparable.

Si toutefois, vous avez besoin d’aide, pour vous ou pour un proche, textez « mieux », au « 741741 », ou, si une vie est en danger, n’hésitez surtout pas à composer le « 911 ».

Donc, le 28 janvier, tout comme le reste de l’année… On cause, pour la cause, pour une #bellcause.

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Tirage !
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Crédit image entête, Rick Osentoski/USA Todey Sports




Sources:
https://www.rds.ca/deuxieme-victoire-pour-le-canada-1.401460
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Jordin_Tootoo
https://www.thestar.com/amp/sports/hockey/2019/11/13/miracle-baby-shows-how-cory-conacher-overcame-diabetes-to-make-nhl.html
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Bobby_Clarke
https://www.gq.com/story/real-life-diet-kaapo-kakko#:~:text=He%20swears%20he%20didn’t,doctors%20for%20almost%20a%20week.
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Terence_Tootoo
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Roanoke_(Virginie)
https://www.lequotidien.com/arts/discussions-avec-mes-parents-sympathique-mais-drole-6717acc843ff3095a8a1eb7e43fcca79
https://fondationdouglas.qc.ca/la-sante-mentale/
https://cause.bell.ca/fr/journee-bell-cause-pour-la-cause
https://ca.portal.gs/?lang=fr-ca
https://www.sportsnet.ca/hockey/nhl/tootoo-reflects-on-last-time-he-saw-his-brother/

David Leboeuf
 

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