Où sont passés les cerbères québécois?

Vous commencez à le savoir: je suis un amateur de hockey très nostalgique, voire passéiste. Peu à peu, je deviens comme ceux de « la ligue du vieux poêle », qui se réunissent, beau temps, mauvais temps, dans tous les restaurants du monde.

Chez ces colorés personnages qui vont chercher, chez McDonald’s, bien plus qu’un petit café « deux, deux », lorsqu’ils échangent à propos des déboires du CH, une phrase revient, tel un éternel refrain: « C’était ben mieux dans mon temps! »

… Ou, comme le disait l’humoriste Mario Jean, dans un de ses spectacles : »Moi, je ferais passer les couleurs: Bleu, blanc, rouge, du Canadien, pour le noir et le blanc, parce que, quand on les écoutait, en noir et blanc, il me semble qu’ils étaient meilleurs! »

En même temps, je suis bien conscient que les dernières éditions des Glorieux n’étaient pas piquées des vers, mais il me semble que celles menées, par: Roy, Turgeon, Recchi, Damphousse, Richer, Carbonneau même Lebeau avaient un petit quelque chose…

Ou peut-être dis-je cela parce que, à l’époque, j’avais moins de dix ans, car, parfois, on écoute un film marquant de notre enfance, et ce n’est plus aussi bon…

Un autre aspect qui semble appartenir aux années 1990 et celles d’avant est l’omniprésence des gardiens de but québécois devant les filets de la Ligue nationale de hockey.

Encore une fois, quitte à abaisser d’un cran les attentes du lectorat, je tiens à rappeler que je ne suis pas un spécialiste du sujet. J’ai une bonne connaissance de l’histoire du circuit Bettman, jumelée à une curiosité intarissable, mais je n’ai aucun diplôme à l’appui… Outre que celui de Gardien Averti qui me fut remis, en 1998…

L’idée de ma chronique hebdomadaire m’est venue, lorsque, dimanche dernier, le 21 février, le journaliste Mikaël Lalancette, annonçait la parution de la biographie qu’il a lui-même écrite qui raconte la vie du célèbre cerbère Georges Vézina.

Comme il le mentionnait, lui-même, lors d’une entrevue accordée aux animateurs de l’émission « Salut, Bonjour »: « Avant les Maurice Richard et Jean Béliveau, même Émile « Butch » Bouchard, il y a eu Georges Vézina pour défricher la place des Québécois dans le hockey, parce que, à l’époque, dans les débuts, c’était réservé aux anglophones. »

Du même souffle, il ajouta que le gardien surnommé « Le Concombre de Chicoutimi », en raison de sa ville d’origine et de son métier d’agriculteur, a certainement été le premier grand gardien de but, non seulement du Québec, mais de l’histoire du hockey en général.

Celui de qui le patronyme fut assigné au trophée remis au meilleur portier de la LNH est malheureusement décédé, en 1926, d’une virulente tuberculose.

Près de 100 ans plus tard, nous sommes retournés, après des décennies fastes et glorieuses, à une rareté des gardiens de but originaires de « la Belle Province »

… Non, pas où ils vendent d’excellents « steamés » et des « smoked meat » qui goûtent le ciel…

Comme le rapportait Martin Leclerc, journaliste pour Radio-Canada: l’an dernier, outre: Crawford, Bernier et Fleury, seulement trois autres gardiens qui provenaient du Québec ont disputé une rencontre soit : Samuel Montambeault, Louis Domingue et Antoine Bibeau.

Dans le même article, il ajouta:  » La pépinière de gardiens québécois, qui était tellement riche naguère, est donc en train de tarir. Il faut remonter à 1959-1960, pour retrouver une saison au cours de laquelle seulement deux gardiens natifs du Québec (cette année, il s’agit de Marc-André Fleury et Jonathan Bernier) avaient disputé 20 matchs ou plus dans la LNH. À l’époque, la ligue était toutefois composée de six équipes. »

Pourquoi ce nouveau portrait des portiers, dans la meilleure ligue de hockey, au monde?

Je crois qu’il y a plusieurs facteurs à pointer du doigt, si le but était de trouver un coupable, mais ce n’est pas le cas.

Le plus évident, selon moi, est l’omniprésence des cerbères nés en Europe. Dans le top 25 des meilleurs gardiens, pour les poolers, une page que j’ai trouvée par le biais du site NHL.com, pas moins de 14 gardiens provenaient de l’autre côté de l’Atlantique.


Si vous croyez que je suis xénophobe, je vais vous remettre les barres sur les « t » et les saucisses dans les « toastés », car, en 2010, quand Jaroslav Halak a, presque à lui-seul, vaincu les Penguins de Pittsburgh et les Capitals de Washington, je me fichais bien d’où il arrivait… Tant qu’il n’arrêtait pas ses miracles!

Comme le rapportait le journaliste Robert Laflamme, pour le quotidien « La Presse » : » Jaroslav Halak a été le grand propagateur de la fièvre des séries qui a atteint Montréal (…) emmenant le Tricolore, jusqu’à un pas de la finale de la coupe Stanley. »

Un peu plus tôt, je vous parlais de la saison 1959-1960, où seulement deux gardiens de but provenaient du Québec, eh bien, au cours de cette saison, il n’y avait effectivement aucun gardien, ni même aucun joueur, provenant de l’Europe.

… Mais le premier joueur européen à évoluer dans la LNH n’était pas bien loin de marquer l’histoire.

Ulf Sterner, un ailier gauche suédois, est devenu le premier joueur à avoir vu le jour et avoir été formé en Europe à jouer dans la LNH, lorsqu’il s’est joint aux Rangers de New York, pendant la saison 1964-1965, mais il ne joua que quatre matchs.

En 1969, toutefois, Tommi Salmelainen, un attaquant originaire de la Finlande, devint le premier joueur européen à être repêché, et ce fut, au 66e rang, par les Blues de St-Louis.

Juste en guise d’exemple: des 126 joueurs repêchés en 1979, seulement six provenaient de l’Europe, soit à peine 4.8%. Dix ans plus tard, leur proportion passait à 15.1%. En 2000, ils représentaient 42%, et il s’agit d’un record.

Pour ce qui a trait spécifiquement aux gardiens, un record fut établi en 2002, lorsque le cerbère finlandais Kari Lehtonen fut repêché par les Trashers d’Atlanta au second rang au total, soit, encore à ce jour, le tour le plus rapide, pour un portier européen.

Maintenant, retournons, dans le temps: vous rappelez-vous d’un certain Vladislav Tretiak, en 1972, au cours d’une certaine  » Série du Siècle »?

Selon la page « the Hockey Writers » : » Contrairement aux gardiens de l’ère moderne qui utilisent la méthode de style papillon, Tretiak affectionnait un style qui combinait de nouvelles méthodes lui permettant de protéger le bas du filet, tout en gardant un style de jeu qui se joue en restant debout. Le résultat fut extraordinaire, quand il est devenu un gardien d’exception, aux yeux du monde entier, au cours de la saison 1972-1973, pendant laquelle il se donna en spectacle lors de la Série du Siècle, entre la Russie et le Canada. »

C’est à cet instant précis que tout un chacun, en Amérique, réalisa qu’il se jouait aussi du bon hockey en Europe, alors que tous s’entendaient pour dire que les joueurs arborant l’unifolié allaient terrasser les Soviétiques, « avec une main, dans le dos ».

Oh, que ça ne se déroula pas ainsi…

Le pays vainqueur de la série, soit le Canada,  marqua le but décisif  lui permettant de ravir les honneurs, lors du match ultime… Par les mains de Paul Henderson… À 34 secondes de la fin du match.

Il y a peu de temps, je vous parlais du match disputé lors des Jeux olympiques de Sotchi, entre le Canada et la Lettonie, où les Canadiens ont eu toute la misère du monde à vaincre un pays qui semblait une proie facile.

Je l’ai dit et je le répète: on n’est jamais à labri d’une bonne leçon d’humilité.

Quoi qu’il en soit: peu importe ce qui explique la chute vertigineuse des portiers québécois, jadis en abondance, notamment grâce à l’entraîneur de gardiens de buts, François Allaire, qui a permis, entre autres, à Patrick Roy et Jean-Sébastien Giguère de devenir des étoiles masquées légendaires.

Selon le site que j’affectionne énormément, NHL.com : » François Allaire a connu les meilleures années de sa carrière entre 1984-1986 et 1995-1996. Sous sa gouverne, Patrick Roy mérita, à deux reprises, le trophée Conn Smythe, remis au meilleur joueur des séries éliminatoires, quatre fois le trophée Jennings, décerné au gardien ayant conservé la meilleure moyenne de buts alloués et trois fois le trophée Vézina remis au meilleur cerbère de la Ligue. »

Aujourd’hui, nous voilà en 2021, et les anges gardiens des filets affluent de partout, dans le monde, et ça vaut, pour le reste des positions existantes.

Le hockey se mue. Le hockey évolue. À l’image des Ducks qui forment « le grand V », en criant : » coin, coin, coin… », le hockey s’ouvre, comme jamais auparavant.

Il est vrai que la surabondance d’équipes dans la Ligue, combinée à la grande quantité de ligues, partout autour du globe, aide à se mettre en lumière, mais le fait est que, comme nous tous… Le hockey change, et n’en déplaise aux conservateurs, comme moi, ce n’est pas près de changer.

Rappelez-vous: on entendra bientôt parler d’un gardien libanais ou d’un attaquant originaire du Kenya.

Ne manquez pas le bateau et ne clignez pas des yeux, car le hockey évolue à un rythme endiablé…

Presque autant que celui des jambières de Tretiak.




Tirage !
Pour avoir une chance de remporter un superbe chandail autographié de Ryan Poehling, consultez le lien ci-dessous :


Crédit image entête, TVASports.ca




Sources:

https://www.journaldemontreal.com/2021/02/21/une-biographie-de-georges-vezina-pour-les-amateurs-de-hockey-et-dhistoire
https://ici.radio-canada.ca/amp/1761821/chronique-martin-leclerc-hockey-retraite-corey-crawford-gardiens-quebecois-lnh-developpement
https://www.nhl.com/fr/news/classement-des-25-meilleurs-gardiens-pour-les-poolers/c-300953960
https://www.lesoleil.com/sports/les-europeens-qui-ont-marque-la-lnh-f2b755d9575cb18f83d60d236e9396e3
https://ici.radio-canada.ca/amp/421529/vendredi4
https://thehockeywriters.com/vladislav-tretiak-goaltending-guru/
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/S%C3%A9rie_du_si%C3%A8cle_1972
https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Kari_Lehtonen
https://www.nhl.com/fr/news/francois-allaire-annonce-sa-retraite-apres-32-ans-de-carriere/c-290855388
David Leboeuf
 

%d blogueurs aiment cette page :