Habstérix et la guigne de la 2e année
Combien de fois, non seulement au hockey mais aussi dans le sport professionnel en général, avons-nous pu voir des athlètes connaître une bonne première saison pour ensuite régresser lors de la seconde? La guigne de la deuxième année fait référence à un cas où un joueur ne parvient pas à combler les attentes relativement élevées après une bonne première année. Même s’il est difficile de mettre le doigt sur la cause exacte, ce phénomène peut s’expliquer autant psychologiquement parlant que par des adversaires qui s’ajustent aux succès des ces jeunes. C’est alors à l’athlète en question de trouver un moyen, grâce à du travail acharné et de la persévérance, de passer au niveau supérieur en effectuant les ajustements nécessaires.
Dans la LNH, il y a plusieurs exemples de joueurs qui ont passé par la fameuse guigne de la deuxième année. Certains d’entre eux en sont ressortis plus forts à leur troisième ou quatrième saison, les autres ont croulé sous la pression, incapables de répéter ce qu’ils avaient accompli à leur première année. Cependant, quand on parle des hauts choix de première ronde, ils ont tendance à trouver une façon de s’en sortir à leur troisième ou quatrième saison.
Voici quelques noms sélectionnés top-4 aux repêchages de la LNH qui ont fait face à la guigne de la 2e année, ou qui ont tout simplement connu une progression plus lente:
- Eric Staal (#2 overall) a inscrit 11 buts à sa saison recrue, avant de passer l’entièreté de sa deuxième saison professionnelle dans la Ligue américaine de hockey (LAH)
- Bobby Ryan (#2 overall) a passé quatre saisons dans la LAH avant de faire le saut dans la LNH.
- Kyle Turris (#3 overall) a marqué 8 buts à sa saison recrue, puis a passé les deux saisons suivantes dans la LAH.
- Ryan Johansen (#4 overall) a connu des saisons de 9 et 5 buts avant de prendre son envol.
- Jonathan Huberdeau (#3 overall) a inscrit 14 buts à saison recrue, 9 à sa seconde et 15 à sa 3e saison avant de passer au niveau supérieur.
- Jonathan Drouin a partagé son temps entre la LNH et la LAH au cours de ses 2 premières saisons. De 70 parties dans la LNH à sa saison recrue, il est passé à seulement 21 pour la seconde (étant alors dans la niche de son entraîneur).
Kotkaniemi
Les Canadiens de Montréal et leurs partisans n’ont pas à chercher bien loin pour trouver l’exemple d’un joueur qui rencontre un peu plus de difficultés à sa deuxième année. Le jeune centre finlandais Jesperi Kotkaniemi se débat pour s’en sortir après une première saison prometteuse dans la LNH. Certains trouvent que c’est alarmant, d’autres se disent que ça fait tout simplement partie de la progression d’un jeune joueur qui entame sa deuxième année à ce niveau. Le fait est que personne ne sait, et que nous allons tous le découvrir dans un an ou deux… mais sommes-nous assez patients pour attendre avant de juger? Posez la question, particulièrement à Montréal, c’est y répondre. La patience et les fans des Habs (incluant les médias) ne vont tout simplement pas ensemble.
Le jeune qu’ils ont surnommé KK a été le premier joueur né dans les années 2000 à évoluer dans la LNH. L’année dernière, il était le plus jeune joueur de la ligue. Malgré tout, il s’est arrangé pour produire 11 buts et 34 points à sa saison recrue, et ce, en dépit du fait que son jeu s’est détérioré en fin de saison, découvrant alors à quel point le calendrier de la LNH était long et épuisant. Sa sélection au troisième rang au total en a surpris plus d’un, mais le jeune homme a rapidement su séduire les partisans de l’équipe avec son éternel sourire, une attitude exemplaire, un jeu prometteur et un charisme dont peu de joueurs peuvent se targuer.
Au camp d’entraînement cet automne, Kotkaniemi avait 16lb de muscle en plus, quelque chose de nécessaire considérant tout le temps qu’il a passé sur ses genoux l’année dernière, constamment repoussé par des joueurs beaucoup plus gros. Mais dès le lancement du camp, nous pouvions voir qu’il y avait quelque chose qui clochait. Il ne patinait plus aussi bien et sa prise de décision ne ressemblait en rien à ce que nous avions pu observer l’année dernière. Avec son coéquipier Jonathan Drouin, Kotkaniemi a dû faire face à la critique pour leur pré-saison décevante et, pendant que le jeune vétéran Douin retrouvait la forme et dissipait les doutes lorsque le calendrier régulier s’est entamé, KK continuait de patiner comme s’il avait des pierres dans les patins… jusqu’à ce qu’il soit placé sur la liste des blessés en raison d’une légère blessure à l’aine.
Cet épisode de repos forcé, ou son retour repoussé, a fait beaucoup jaser à Montréal. Est-ce que le Tricolore cachait quelque chose? Est-ce qu’ils l’empêchaient de revenir au jeu? Disons simplement que les théories du complot fusaient de toute part, remettant en question la pseudo-transparence de l’organisation. Mais bon, nous y sommes habitués, n’est-ce pas? Les médias ont un produit à vendre, et il semble y avoir un groupe de partisans qui se nourrit de ce genre de choses.
KK a finalement raté sept parties avant de revenir au jeu le 16 novembre contre les Devils du New Jersey, dans un match au cours duquel il a joué seulement neuf minutes. Le match suivant, contre les Blue Jackets de Columbus, il a enregistré un temps de glace de 14:17 minutes, et il n’a rien montré de bon, offensivement parlant, durant ces deux matchs. Dans les faits, Kotkaniemi a seulement 3 points (2 buts, 1 aide) en 14 matchs cette saison. Son temps de jeu est passé de 13:44 minutes par match l’année dernière à 12:50 minutes, alors que son utilisation sur le jeu de puissance est passée de 1:56 à 1:08 minutes par match cette saison.
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Le processus
Certains fans et médias se montrent particulièrement durs envers KK et même s’ils n’ont pas tort d’affirmer que son jeu n’est pas au même niveau que l’année dernière, ils semblent oublier qu’il a seulement 19 ans et que le développement d’un joueur n’est pas un sprint. Ceux qui se plaignent le plus sont souvent les mêmes qui se plaignaient que le Tricolore avait ruiné le développement de Alex Galchenyuk. La vérité c’est que les Canadiens utilisent une approche progressive avec le jeune homme, s’adaptant à sa progression (ou une légère régression dans son cas). Le Canadien ne peut tout simplement pas se permettre de manquer le bateau avec cette sélection, et ils le savent. En dépit de ce que les sensationnalistes veulent essayer de nous faire croire, Claude Julien, Dominique Ducharme et Kirk Muller travaillent AVEC Kotkaniemi et non CONTRE lui.
Aussi, il faut mentionner que KK bénéficie énormément de l’exceptionnel leadership du capitaine de l’équipe Shea Weber, ainsi que de meneurs comme Carey Price, Brendan Gallagher, Jeff Petry, Nathan Thompson, Paul Byron et compagnie. Ces gars sont passés par-là et ils prennent les jeunes sous leurs ailes, Kotkaniemi inclus. En outre, le jeune homme a le luxe d’évoluer derrière des joueurs de qualité, ce qui devrait, en théorie, le soulager d’une pression inutile. Mais nous pouvons être sûr d’une chose: si des pressions sont exercées sur lui, ça ne vient pas de l’organisation. Ça vient des médias assoiffés de sang et des partisans qui ne savent pas de quoi ils parlent, ou encore de ceux qui veulent si désespérément que Marc Bergevin échoue, qu’ils en viennent à espérer que KK se plante dans l’espoir de pouvoir prouver qu’ils ont raison.
Il n’y pas de doute qu’une partie de cette pression imposée par les partisans et les médias vient de l’étonnante tenue de la recrue Nick Suzuki, dressant inévitablement des comparaisons entre les deux. Ce que ces gens semblent oublier, c’est que Nick est un an plus vieux. Aussi bon soit-il en ce moment, nous ne pouvons oublier le fait qu’à 19 ans il évoluait encore dans le junior. Koktaniemi, lui, était déjà dans la LNH à 18 ans. Alors la vraie question est: où KK en sera-t-il dans son développement dans un an, et non pas où est-il maintenant.
À mon humble avis, d’un point de vue extérieur, Kotkaniemi va bien. Il traverse la guigne de la deuxième année, mais il est entre de bonnes mains. Comme vous le savez peut-être, j’ai parfois critiqué les décisions de Claude Julien mais je suis entièrement confiant et en faveur de la façon dont il gère son jeune centre. Il le protège plus que jamais. Nous avons déjà déconstruit le mythe voulant que Julien ne soit pas bon avec les jeunes joueurs, et il fait avec KK la même chose qu’il a fait d’autres jeunes joueurs qu’il a entraînés auparavant.
Certains partisans aimeraient qu’il lui donne du temps en supériorité numérique et qu’il lui offre une chance sur l’une des deux premières lignes dans l’espoir qu’il retrouve son mojo. En ce qui me concerne, j’estime que ce serait trop risqué et que cela nuirait à sa confiance et à son développement alors même qu’il est en train de se chercher. N’allons surtout pas oublier que la liste des tâches du travail de Julien inclut le développement des joueurs, bien que son mandat principal soit de gagner des matchs et de placer ses joueurs dans des positions lui permettant d’y parvenir. KK est encore un enfant qui joue contre les meilleurs hommes au monde. Il poursuit son processus d’apprentissage, grandissant autant physiquement qu’émotionnellement. Il apprend. Il a une attitude exemplaire. Il sera bon, probablement vraiment bon. Donnez-lui le temps, les amis, et faites confiance au processus. Go Habs Go!
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Crédit image entête, Habsterix.com