Chronique : évaluation d’un espoir avec Marco D’Amico
Pour ceux qui m’ont déjà lu par le passé, vous savez que Marco, l’un de nos partenaires, a appris à regarder les joueurs d’un autre œil que celui d’un simple partisan. Il a pu entendre plusieurs recruteurs dans la LHJMQ et il a même été assis à côté d’un dépisteur avec qui il a échangé sur le sujet. Si vous regardez sa moyenne de bonnes prédictions pour le repêchage 2020 dans la première ronde, c’est assez impressionnant. Surtout dans le top 10.
Top-62/Draft 2020, classement final (5 à 1)
… et vous pourrez voir tous les autres choix à partir de cet article.
Alors, parlons avec lui pour découvrir comment analyser les jeunes joueurs, et ce même une fois repêché.
Tout d’abord, quels sont les attributs que l’on regarde ? La vitesse, le maniement de la rondelle, la protection de la rondelle, le jeu physique… Il y a beaucoup d’habiletés à regarder, mais quelles sont les plus importantes selon toi Marco ?
– Pour moi, c’est toujours le QI Hockey avant tout. Un joueur va être plus en mesure de savoir comment surmonter les obstacles dans n’importe quelle situation avec un excellent sens du jeu. Après ça, il y a bien sûr la vitesse, la puissance (pas nécessairement le poids), et les outils offensifs (tirs, visions, etc.).
Il y a aussi le côté ligue et le côté équipe que nous devons regarder. Aujourd’hui, les joueurs se développent dans plusieurs ligues différentes. La NCAA fait de plus en plus d’heureux en développant des joueurs. De plus en plus d’équipes se tournent vers ses rangs universitaires. Mais, il y a aussi la Ligue canadienne, LCH, la ligue élite de Finlande LIIGA et même la KHL pour ne nommer que celles-là. Quand vient le temps d’évaluer un joueur, j’imagine que c’est important de connaître la ligue dans laquelle il évolue, l’équipe pour laquelle il joue et le calibre de ses coéquipiers aussi ?
– C’est impératif de connaître la ligue et le contexte de ce dernier. Regardons simplement le début de saison en KHL cette année. Juste avant le repêchage, il y avait certains espoirs russes qui ont dû être rappelés en KHL et jouer un rôle important, car des alignements au complet ont été écartés à cause de la Covid. Le calibre de la ligue a donc diminué, mais plusieurs ne le savaient pas et ceci aura affecté leurs opinions de certains espoirs comme Rodion Amirov ou Shakir Mukhamadulin, qui ont bénéficié de la visibilité en KHL, ainsi que la baisse du niveau de compétition, pour se démarquer offensivement.
Même au Canada, connaître la différence du calibre de hockey des trois ligues juniors majeures chaque année est impératif dans l’évaluation de certains jeunes.
Pour utiliser un exemple de joueur qui n’a peut-être pas eu d’excellentes statistiques dans le junior, mais qui a malgré tout faire son chemin dans la LNH, je parlerais de Patrick Roy. Un gardien qui a connu du succès dans le Midget AAA et qui a été bombardé de tous les côtés avec les Bisons de Granby dans la LHJMQ avec une équipe faible. Le reste de l’histoire, vous la connaissez je crois. Selon toi Marco, qu’est-ce que les recruteurs ont pu voir chez Patrick pour enfin le repêcher en 2e ronde ?
– Patrick avait du chien et jouait derrière une équipe épouvantable défensivement aussi. On n’avait pas les statistiques avancées dans le temps, mais Roy faisait face à un nombre élevé de chances dangereuses par matchs dès le départ de sa carrière junior. Il a su apprendre très vite comment faire face à l’adversité et se surpasser. Le reste, on le connaît 😊.
Un exemple du contraire, c’est Zachary Fucale, qui a commencé en feu statistiquement à 16 ans, car il jouait derrière une machine offensive avec les Mooseheads d’Halifax. Il ne faisait pas face à un haut taux de tirs dangereux ou de situations difficiles pour le pousser de l’avant.
Donc c’est plutôt dans la personnalité d’un gardien, ainsi que son style, que plusieurs recruteurs de gardiens de but se fient maintenant. Les gardiens sont tellement difficiles à prévoir, mais les meilleurs, on les voit de loin.
Après que le joueur soit repêché, pour mieux comprendre son développement, c’est pratiquement la même chose pour évaluer le joueur. Il faut prendre en compte le calibre de la ligue dans laquelle il joue, le calibre de son équipe et de ses coéquipiers et un peu ses statistiques. Mais, il faut surtout l’analyser en le regardant jouer sur plusieurs matchs. Sur quoi Marco D’Amico se base pour évaluer la progression d’un joueur comme Cole Caufield par exemple ?
– Quand je regarde Caufield, je sais qu’il va en marquer des buts, donc je ne me fie pas vraiment sur ses buts pour voir sa progression. À l’inverse, j’observe des aspects de son jeu qui n’étaient pas très bons l’année passée (le transport de rondelle, son jeu de passe, son jeu défensif, son jeu en transition, etc.).
Si on le regarde justement cette année, il transporte souvent la rondelle tout seul, il distribue des passes savantes et rend ses coéquipiers meilleurs cette année. C’est la marque d’un joueur de talent qui est en pleine progression. Le but est toujours de devenir un joueur plus complet dans les rangs mineurs afin de pouvoir diversifier son jeu dans les rangs professionnels, au besoin.
En terminant, aurais-tu d’autres conseils à donner aux fans afin de mieux évaluer un joueur, autre que de ne pas se fier à Normand Flynn ?
– Il faut regarder plusieurs matchs et se fier aux détails. La vraie progression d’un espoir se trouve dans les petits détails de son jeu. Donc, voir comment ils pensent, réagissent à l’adversité et diversifient leurs jeux. C’est beaucoup plus indicatif de la progression du joueur.
Regardons justement Suzuki et KK. Ils ont beaucoup diversifié leurs jeux depuis les 2 dernières années. KK a commencé à tirer un peu plus souvent devenant un sniper en devenir (même si on le voyait plutôt comme un fabricant de jeu), tandis que Suzuki est quant à lui maintenant vu comme un centre pur qui est capable de jouer toutes les situations.
Merci beaucoup pour cette aide précieuse Marco. Continue ton bon travail !
En espérant que ça puisse vous aider pour analyser les jeunes joueurs un peu partout à travers le globe. Prenez le temps d’analyser avant de dire n’importe quoi sur un joueur.
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Crédit image entête, GETTY IMAGES/ANDY MARLIN via Ici.Radio-Canada.ca
