Le mois de l’histoire des Noirs
En 1875, aux États-Unis, naquit le Docteur Carter G. Woodson, et c’est lui qui initia le mouvement social de la semaine des Noirs, en 1926, et, en 1976, à l’occasion des festivités du bicentenaire américain, « la semaine » devint « le mois ».
Le mois de février fut choisi, pour tenir cet événement, car il correspond à l’anniversaire de deux grands abolitionnistes, soit Frederik Douglas et Abraham Lincoln.
Comme nous sommes présentement au cours de ce mois comportant une grande charge émotive et, je crois, nécessaire d’être porté à la connaissance de tous, j’ai cru qu’il serait à propos de dresser un bref survol de l’histoire des Noirs au hockey professionnel.
Toutefois, je tiens à spécifier que je ne suis pas spécialisé dans l’histoire des Noirs ni en matière de ségrégation raciale mais si on prend le temps d’échanger calmement, il n’y a aucun moyen qu’on n’arrive pas à nous comprendre.
Non, je me considère plutôt comme un chroniqueur curieux et passionné par le hockey qui cherche à tout comprendre… Même l’incompréhensible.
Vous êtes partants? Super! Alors, tous à bord du Bus Magique…
… Mais imaginons un autobus scolaire reconverti qui empeste: la testostérone, le Gatorade à l’orange, le concours de flatulences et le Axe.
Hum, ah, la puberté…
Bien que la Ligue nationale de hockey fut créée le 26 novembre 1917, il fallut attendre le 18 janvier 1958, avant qu’un premier joueur noir dispute une rencontre de hockey professionnel.
Cette page d’histoire névralgique fut écrite par Willy O’Ree, un joueur canadien, né à Fredericton, en 1935.
Savez-vous le plus impensable dans cette histoire marquante?
Deux ans auparavant, alors qu’il jouait pour les As de Québec, après avoir reçu une rondelle au visage, ce qui eut pour effet de le rendre borgne à 95%, mais il parvint à cacher ce détail non négligeable à la direction des Bruins de Boston, qui, autrement, ne l’auraient fort probablement jamais inséré dans l’alignement qui avait pour lourd mandat d’affronter Maurice Richard et les Canadiens de Montréal.
O’Ree, pugnace et déterminé comme nul autre, amassa tout de même quatre filets et 10 mentions d’assistance, en 1961, car il ne participa qu’à trois matchs en 1958 puis ne revint qu’en 1961.
Qu’importe, une barrière venait de tomber, non sans fracas.
Si le premier joueur noir à évoluer dans la Ligue nationale de hockey fit son apparition en 1958… Le deuxième foula la glace, en 1974.
Michael Robert Marson, qui a vu le jour, en 1955, a disputé cinq saisons, avec les Capitals de Washington et les Kings de Los Angeles. Bon an, mal an, il amassa 48 points, en 196 matchs, ce qui est prodigieux pour un joueur totalisant 233 minutes de pénalité, car, comme il était le seul joueur noir, il est indubitable qu’il était un joueur marqué.
La vie d’un joueur noir, en 1974…aux États-Unis dépasse largement la moquerie raciste assumée, bien que je ne cautionne cette dernière, en aucun cas.
Il y a des villes où Marson n’était même pas admis à l’intérieur de l’hôtel où résidait son équipe, qui en était à sa première année d’existence.
À New York, alors que ses coéquipiers passaient l’entrée comme dans du beurre, Marson devait répondre aux questions des gardes de sécurité, car, un joueur noir… Ça n’existait pas.
Ce genre de soucis logistiques étaient monnaie courante pour l’attaquant d’origine canadienne, même quand il fallait réserver des sièges pour un vol.
Aux États-Unis, c’était ça, dans les années 1970, car il ne faut pas oublier les émeutes raciales majeures de: 1965, à Los Angeles, de 1967, à Newark et à Détroit, et celle de 1968, dans plus de 25 villes américaines, suite à l’assassinat de Martin Luther King. Uniquement pour ces manifestations mentionnées, car il y en a eu plusieurs autres, on dénombre près de 150 morts et des milliers de blessés…
Mais, toutefois, rien n’empêchait les athlètes noirs de performer dans les plus prestigieux amphithéâtres du monde.
Je n’oserai jamais comparer l’histoire du peuple noir à celle des Canadiens français, car ce sont deux luttes bien distinctes, mais j’aimerais parler superficiellement de Maurice Richard.
Maurice Richard, au cours de sa carrière, qui s’est étalée de 1942 à 1960, a marqué l’imaginaire et pas seulement pour ses statistiques et ses honneurs.
Comme il est si justement mentionné dans le film portant sur la vie du Rocket, Richard s’est donné en exemple comme quoi même les Canadiens francophones pouvaient dominer dans la plus grande ligue de hockey… Au monde.
Fuhr est apparu, dans le paysage du hockey, en 1981, à Edmonton… Eh oui, à l’intérieur de la grande dynastie des Oilers menés par un certain Wayne Gretzky. L’équipe albertaine remporta pas moins de cinq Coupes au cours de cette décennie.
Étant un athlète d’exception, la même année, il fut repêché, par les Padres de San Diego… Eh oui, dans la Ligue majeure de baseball, mais, Dieu merci, il a choisi la mitaine, plutôt que le gant.
Fuhr accrocha ses jambières en 2000, mais l’Histoire venait d’être écrite.
Par la suite, on assista à l’émergence de plusieurs joueurs noirs, dont: Anson Carter, Ray Emery, Anthony Duclair, Fred Brathwaite, Jarome Iginla, Mathieu Joseph, Kevin Weekes, Donald Brashear, Evander Kane, Bokondji Imama, Mike Grier, Dustin Byfuglien, Georges Laraque, Wayne Simmonds et, évidemment… Pernell Karl Subban.
J’ai personnellement été charmé par le flamboyant défenseur, lauréat du trophée Norris, remis au meilleur défenseur du circuit Bettman, en 2013. J’aimais cette façon, non, cette rage, qu’il avait d’être lui-même, à l’intérieur et à l’extérieur de la glace, peu importe les réactions provoquées par celui qui ose être lui-même.
Saviez-vous que même l’ex-joueur de soccer, même sur la scène internationale, Patrice Bernier, a évolué pour les Foreurs de Val-d’Or dans la Ligue de Hockey junior majeur du Québec?
Toutefois, bien que le rêve de jouer au hockey professionnel est maintenant une possible pour les enfants noirs de partout dans le monde, une question demeure…
Pourquoi si peu de Noirs, au hockey?
C’est la question que Damon Kwame Mason, un producteur télévisuel canadien et créateur du projet récipiendaire de nombreux prix « Soul on Ice: Past, Present & Future », un documentaire qui vise à analyser l’apport des athlètes noirs dans le monde du hockey, et ce, des ligues mineures jusqu’à la LNH, tente de comprendre.
Mercredi, le trois février, Mason tiendra un visionnement de son documentaire avec: Gary Bettman, Ted Leonsis, le propriétaire des Capitals de Washington, ainsi que plusieurs ex-joueurs de hockey professionnel noirs, dans le cadre du mois des Noirs et de celui du Hockey pour tous, qui se tiendra en mars.
Je souhaite ardemment qu’on parvienne collectivement à trouver des solutions, à ce racisme systématique qui perdure depuis toujours.
La bataille est loin d’être gagnée, mais je crois qu’elle le sera, grâce à de jeunes joueurs noirs au caractère fort, comme Marson qui a bien fait rire ses enseignants à l’école primaire quand il répondait que son rêve était de jouer dans la LNH.
Les barrières tomberont, grâce à des individus qui n’ont pas peur d’être eux-mêmes et de se battre pour se tailler une place.
Sources:
