Les grosses couilles de Marc Bergevin

Au fur et à mesure que le marché des joueurs autonomes approchait, on avait droit aux mêmes critiques et reproches. À en croire certains, Bergevin ne ferait rien. Comme à son habitude, disait-on. De toute façon, peu importe la période de l’année, on a toujours droit à la même rengaine; Bergevin ne fait jamais rien :

Il a peur de faire des grosses transactions. Il ne bouge jamais à la date limite (Vanek, Petry). Il repêche mal en 1ere ronde (Caufield, Kotkaniemi, Poehling, Sergachev, Juuslen, Galchenyuk. Bien sûr, il y a aussi eu Scherbak et McCarron. Mais si on se fit à la loi du nombre…). Il ne signe jamais personne le 1er juillet. Sur ce dernier point, Bergevin n’a jamais caché ses sentiments face au zoo du marché des joueurs autonomes. À toutes fins pratiques, l’histoire semble lui donner raison. Il a d’ailleurs probablement retenu sa leçon avec le dossier Alzner. Après tout, il ne s’agit pas de prétendre qu’il est parfait. De plus, il n’a jamais caché qu’il n’hésiterait pas à soumettre une offre hostile, si les conditions s’y prêtaient.

Maintenant que c’est fait, on en voit d’autres, parmi la horde des perpétuels mécontents, qui trouvent cette offre insatisfaisante. Les mêmes qui se seraient sans doute plaints que le Canadien a trop payé, pleurant les 4 choix cédés en retour d’une offre trop grosse, sont en ce moment très tristes de constater que Marc Bergevin n’a pas offert « assez » :

Pourtant, il ne faut pas chercher très loin pour trouver les éléments qui viennent justifier la chose. D’abord, on veut bien entendu éviter de surpayer. 4 choix de première ronde, c’est beaucoup. 10M+, c’est aussi beaucoup. Ensuite, on a usé de ruse. En structurant brillamment le contrat de Aho à l’aide de plusieurs bonis à la signature, on tente le tout pour le tout. 3.65M en salaire, 38.6M en bonis… Cela dit, histoire d’augmenter les chances de succès, je n’aurais pas été contre le fait de bonifier l’offre au palier suivant. C’est-à-dire, plus ou moins 1M de plus et 2 choix de 1ere ronde. Cependant, j’ose croire que  Bergevin sait très bien ce qu’il fait. Laissons-lui le bénéfice du doute.

Est-ce que les Hurricanes, qui se sont empressés de déclarer plus tôt ce matin qu’ils égaleraient n’importe quelle offre, ont vraiment les poches assez profondes pour allonger 21 millions de dollars en moins d’un an sur un seul joueur, dont 11.3M à la signature du-dit contrat ?

… Surtout en sachant que le principal concerné désire vraiment venir jouer à Montréal ?

On aura la réponse bien assez rapidement. À en croire les Canes, ils auraient la ferme intention d’aller jusqu’au bout :

À partir du moment où les Hurricanes passeront à l’acte, d’ici un maximum de 7 jours, ils disposeront de 5 autres journées pour verser le fameux boni… Pour vous et moi Geoff Molson et Marc Bergevin, ce n’est peut-être pas beaucoup comme montant, mais qu’en est-il de Tom Dundon et Don Waddell ? Pour le moment, ils se contentent de parler. N’oublions pas que l’équipe vient tout juste de payer pour racheter le contrat de Marleau…

Du reste, il faut cesser de croire que cette manœuvre menotte le DG du Tricolore. S’il désire vraiment signer Jake Gardiner, ou même Anders Lee, par exemple, il le fera (pour autant que ces derniers soient intéressés, bien entendu). Dans le pire des cas, il ajustera le tir par la suite. S’il y a une autre chose que Bergevin nous a prouvé, c’est qu’il était doué pour larguer du salaire. Bon, il n’a pas su faire de miracle avec Karl Alzner, mais on parle du DG qui s’est assez facilement départi de plusieurs contrats un peu fatigants : Travis Moen et René Bourque sont deux noms qui me viennent rapidement en tête. D’aucun dirait que plusieurs personnes s’attendaient à ce qu’il doive retenir du salaire pour échanger Andrew Shaw, et pourtant…

Vous avez le droit de ne pas être toujours en accord avec les décisions de Marc Bergevin, mais c’est impossible de lui reprocher de manquer de couilles. Ses patins viennent de suivre ses babines; il vient de prouver qu’il est prêt à tout pour améliorer son équipe. Une chose qui aurait été plus difficile à dire, s’il avait allongé 10M+ et cédé 4 choix de première ronde pour faire le même exercice… Il s’agit d’un coup parfaitement calculé. Il y avait Duchene, il y avait Point. Il a choisi de miser sur Aho.

Peu importe le dénouement, les grands perdants, dans toute cette histoire, seront invariablement les Canes. S’ils n’égalisent pas, piégés par une faille qui désavantage les plus petits marchés, ils perdront un joueur de premier plan en retour d’une bien maigre compensation : 1er, 2e et 3e choix. S’ils égalisent, ils se retrouveront avec un joueur qui ne veut pas vraiment jouer pour eux. Un joueur qu’ils paieront plus que ce qu’ils auraient vraiment voulu. À le payer avec un énorme boni à la signature.


Crédit image entête, NHL.com

Tom L.D. MacAingeal
 

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